La crise financière est elle victime des normes comptables ?

Ces normes comptables qui imposent aux sociétés cotées de suivre les règles de la comptabilité en « juste valeur » seraient un des facteurs principaux de la crise financière qui secoue actuellement le monde de la finance. Une grande partie des acteurs financiers et industriels le clame haut et fort et à priori à juste titre. Mais la fiabilité de ce système n’a pour l’heure pas de solution de remplacement aussi efficace.

La comptabilité dite en « juste valeur » implique une entreprise à déclarer ses actifs à la valeur où l’on pourrait les vendre à un instant T. Ce système est imposé par les normes comptables en vigueur, aussi bien aux Etats-Unis que dans la finance internationale. Et c’est justement ce principe qui est décrié aujourd’hui comme étant la cause de la crise internationale. Deux problèmes sont pointés du doigt : l’illiquidité et la procyclicité. L’illiquidité concerne la déclaration au bilan d’actifs qui n’ont généré aucune transaction et la procyclicité concerne les évolutions du marché que les normes accentuent à tort.

2. L’illiquidité comme générateur de la tourmente

La définition de la « juste valeur » propose un calcul selon trois possibilités : le prix du marché observable, le prix du marché observable d’un produit similaire ou le résultat d’un modèle d’évaluation financier. Lorsque le calcul s’est porté sur les prêts immobiliers titrés, il s’est trouvé confronté à un marché marqué depuis 2007 par un impressionnant déséquilibre entre l’offre et la demande. L’argument de l’illiquidité obligeait donc les banques à déclarer une baisse de valeur sur des titres dont la valeur intrinsèque est définie comme « potentiellement génératrices de revenus ». Une baisse de valeur injustifiée qui a entraîné une baisse du cours des actions. Suite à quoi, les banques sont contraintes, afin de maintenir leur ratio de solvabilité (qui assure leurs fonds propres, garants de leurs activités), soit d’augmenter leur capital, au détriment des actionnaires, soit de limiter l’accès aux prêts, quite à générer une dépression dans l’économie.

3. La procyclicité comme propagateur

Le prix du marché fixe la valeur d’un titre financier. Considérant ce prix du marché comme indicateur définitif devient discutable dès lors qu’elle accentue dans les deux sens la solidité des bilans bancaires : à la hausse, lorsque le cycle est positif et à la baisse, lorsqu’il est négatif. De nombreux travaux de recherches l’indiquent. Le prix du marché est imparfait car soumis aux aléas de la spéculation. Ce serait vrai aussi bien en temps normal qu’en cas de bulle spéculative, et d’abord à cause des trop grandes différences de niveau d’information entre les différents agents économiques. Les normes comptables accorderaient donc trop d’importance aux phases d’expansion et de récession économique et en accentueraient donc les effets.

4. Pas d’alternative pourtant

Comme dans toutes les situations de la vie courante, on ne pointe du doigt les dysfonctionnements que lorsque tout va mal. Les normes comptables sont les mêmes que lorsque les cours de la bourse s’envolaient il y a deux ans. Il ne se trouvait alors personne pour s’en plaindre. Qui songerait d’ailleurs à se plaindre que les choses vont « trop bien » ? Certains Cassandre se levaient déjà au son du « plus dure sera la chute » mais personne pour véritablement rappeler que le système de mesure et de contrôle des marchés pouvait en aggraver les effets. Face au désastre actuel, conséquence ou non, directement ou indirectement, des normes comptables qui régulent l’économie mondiale, il n’y a pas de réforme de ces normes qui soit satisfaisante aussi bien du point de vue de la transparence comptable que de l’efficacité financière. En d’autres termes, pas de solution miracle qui viendrait dénouer le problème actuel en un tour de main. Et vue d’ici, la situation n’aurait été ni meilleure, ni pire si ces normes n’avaient pas été là pour réguler la machine… Juste peut être un peu plus compliquées à comprendre

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Journaliste de formation, j'occupe actuellement la fonction de rédacteur au sein du réseau des sites Internet de services aux entreprises du groupe Libbre. Je peux justifier d'une expérience de six ans dans la presse quotidienne angevine au sein de trois quotidiens : la Nouvelle République, Ouest-France puis le journal majoritaire en Maine-et-Loire : le Courrier de l'Ouest (2007-2009).

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